Transfert de fréquence optique

Les techniques de lien optique consistent à transférer par fibre optique le signal d’un laser ultrastable, dont la fréquence constitue le signal métrologique. Il s’agit d’un laser émettant à la longueur d’onde de 1,55 μm, à l’intérieur de la bande de fréquence utilisée par les réseaux de télécommunications optiques à longue distance. La fréquence de ce laser est stabilisée sur une cavité Fabry-Perot ultrastable et peut être référencée aux horloges optiques et micro-ondes du LTE à l’aide d’un peigne de fréquence. Ainsi, on peut contrôler la fréquence du laser à un niveau meilleur que 10-15 en valeur relative.

Légende figure : Instabilités typiques des différents moyens de comparaison de fréquences (liens optiques de 500 km ou plus, et liens satellitaires) et des horloges micro-ondes et optiques, en fonction du temps de moyennage (la durée sur laquelle on mesure la fréquence). La courbe bleue en pointillés correspond à l’instabilité mesurée sur un lien optique fibré de 1100 km entre Paris et Nancy et retour

Une partie de la lumière du laser ultrastable est injectée dans la fibre optique. Cependant, les fluctuations thermiques et le bruit acoustique perturbent le temps de propagation de la lumière dans la fibre et induisent des fluctuations de la phase et donc de la fréquence transmise. Pour compenser ce bruit, on mesure les fluctuations de la phase du signal transmis après un aller-retour dans la fibre et on les compense avec un système électronique (voir figure).

Légende figure : Le laser ultrastable du laboratoire de métrologie est transmis par fibre optique au laboratoire distant (utilisateur), où une partie du signal est renvoyée afin de détecter les instabilités de phase ajoutées lors de la propagation dans la fibre. Les miroirs de Faraday (MF) permettent de réaliser un interféromètre de Michelson très déséquilibré et de contrôler la polarisation des faisceaux. Un modulateur acousto-optique (MAO) est utilisé pour appliquer la correction du bruit. PD : photodiode, CO : coupleur optique.

On réalise le battement entre le signal injecté et le signal retour. Ceci donne l’erreur de phase accumulée. On applique ensuite une correction égale, au signe près, à la moitié de l’erreur de phase mesurée afin que le signal à l’extrémité de la fibre soit affranchi du bruit induit lors de l’aller simple. Cette méthode suppose l’absence de bruits non réciproques (non identiques à l’aller et au retour) qui ne peuvent pas être corrigés. Enfin, pour caractériser la fréquence arrivant dans le laboratoire distant, celle-ci est renvoyée vers le laboratoire initial (via une seconde fibre stabilisée selon le même procédé) pour être comparée avec celle du signal initial. Dans cette méthode de transfert, la bande passante de l’asservissement est limitée par le temps aller-retour de la lumière dans la fibre. Pour une fibre de 100 km, elle est de l’ordre d’un kHz.

Cette technique de compensation du bruit de phase a d’abord été développée pour des liens optiques utilisant des fibres dédiées, en France et à l’étranger. Cependant, ces développements étaient freinés par le coût très important de l’accès aux fibres, qui ne permet pas d’envisager la construction de réseaux fibrés métrologiques à l’échelle nationale ou internationale. Nous avons donc proposé d’exploiter l’infrastructure de fibres qui relie déjà tous nos laboratoires, grâce au réseau académique national RENATER. Le principe est de multiplexer en longueur d’onde le signal métrologique avec les signaux optiques qui transportent les données numériques de télécommunications. Ces signaux optiques sont transmis sur des canaux différents, c’est-à-dire a des fréquences proches mais différentes, si bien que leurs propagations seront indépendantes et qu’il n’y aura pas d’interférences. On retrouve ici les principes classiques du multiplexage en longueur d’onde des réseaux de télécommunications optiques. Nous avons donc établi une collaboration avec RENATER et montré qu’il était effectivement possible de transporter dans la même fibre en parallèle le signal métrologique et les données numériques, sans perturbation de ces signaux.